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Spitz - Laloe interviewLa vie limitée des disques durs, clés USB, CD et DVD

Avec Erich Spitz, correspondant de l’Académie des sciences, et Franck Laloë, rapporteur du rapport sur la longévité de l’information numérique

Si vous conservez vos photos, vos musiques, vos vidéos... sur le disque dur de votre ordinateur, sur une clé USB ou sur CD, restez vigilants : tous ces outils de stockage de l’information ont une durée de vie limitée à quatre ans en moyenne ! Comment faire pour éviter l’amnésie et quelle politique adopter dans le cadre de la numérisation du fonds de bibliothèques en cas de pertes régulières ? Éléments de réponses avec Erich Spitz et Franck Laloë, auteurs avec Jean Charles Hourcade du rapport Longévité de l’information numérique de l’Académie des sciences et de l’Académie des technologies.

Si les informaticiens se doutaient depuis le début des années 1980 que les supports numériques n’étaient pas fiables à long terme, Erich Spitz estime en revanche que 90% du grand public n’était pas au courant de ces « amnésies numériques ». « Les utilisateurs savaient qu’il pouvait y avoir des "accidents", des "crash" dans le jargon informatique. Mais se sont-ils posé la question de savoir quelle était la durée de vie du disque copié ou du disque dur d’un ordinateur ? »

La dégradation d’un disque

RapportLes disques optiques, qu’ils soient CD, DVD ou Blu-ray sont des édifices compliqués comme nous l’explique Franck Laloë : « Tous ces disques sont des sandwichs dont la base est un morceau de plastique sur laquelle on dépose une matière métallique, puis une couche de colorant et enfin différents vernis protecteurs.
Ces derniers éléments sont sensibles aux polluants chimiques dans l’air, aux molécules d’eau et au soleil. Cela produit un vieillissement interne et une altération de l’information. »

Des tests ont été réalisés au Laboratoire national d’essais en France pour observer les résultats après vieillissement accéléré de CD. « Malheureusement, nous n’obtenons pas d’homogénéité dans les résultats. Les lots, la marque du produit, les années de fabrication sont autant d’éléments qui interagissent » assure Erich Spitz.

La stratégie adoptée par le CNES et par la BNF

L’information numérique a cette qualité qu’elle peut se dupliquer à l’infini pratiquement sans erreur.
« La BNF et le CNES ont opté pour cette solution » affirme Franck Laloë. « Elle consiste à numériser les informations et les dupliquer sur des CD tous les 3 ans en moyenne. L’Ina travaille un peu différemment avec des disques optiques enregistrables. »
Mais cela pose un problème d’organisation et de coût. « C’est la raison pour laquelle des sociétés qui s’engagent à conserver vos informations se développent » en déduit Erich Spitz.
Certaines entreprises ont fait le choix de revenir en partie à l’analogique pour stocker leurs informations. Certains fabricants de films ont choisi de conserver leurs produits sur des films argentiques en plus d’un support numérique.

CD, DVD et Blu-ray achetés chez votre disquaire : une durée de vie indéterminée... !

CD, DVD et Blu-ray sont-ils concernés par cette amnésie qui touche les disques durs et autres supports vierges au delà de 4 ans de bons et loyaux services ?
« Nous n’en parlons pas dans notre rapport », précise Franck Laloë. « Cependant, il est clair que la durée de vie des CD et DVD tout enregistrés est supérieure aux CD enregistrables parce que la technique de fabrication et de pressage est différente. Cela dit, leur durée de vie n’est pas infinie non plus : laissez un DVD au soleil pendant six mois, il deviendra illisible. »

Précision importante : on observe une interdépendance entre la capacité qui augmente et la longévité d’un DVD : plus la capacité est grande, plus les inscriptions sont petites pour tenir sur un seul DVD. Or en physique, plus un objet est petit, plus il est sujet à détérioration.
« On a peu de données à l’échelle d’un siècle pour les Blu-ray mais a priori, on pourrait s’attendre à ce que leur durée de vie soit inférieure à celle des DVD » conclut Franck Laloë.

Longevity of Digital Information backsidePourquoi ne pas créer de CD dont la durée de vie serait plus longue ? « Parce qu’il n’y a pas encore de marché ! » s’exclame Erich Spitz. « Il faut savoir que l’on fabrique quelque 10 milliards de disques enregistrables par an. La concurrence est rude entre les fabricants, l’idée n’est pas encore de proposer des produits plus chers aux consommateurs. Et puis le grand public ne pense pas encore réellement à conserver ses photos, ses vidéos ou autre sur 50 ou 100 ans ».
Il y a plus de 20 ans, un CD à la durée de vie beaucoup plus longue a été mis sur pied en France ; il s’appelait le Century disc. La technique consistait à graver l’information par litho-gravure directement dans le verre. Mais le coût trop élevé de fabrication n’a pas permis sa commercialisation.

Les recommandations de l’Académie des sciences et de l’Académie des technologies dans le rapport Longévité de l’information numérique tiennent principalement en deux points :
- que les organismes publics et privés lancent des programmes de recherche en France pour optimiser et développer le stockage à long terme de l’information.
- que les institutions françaises adoptent une politique d’archivage cohérente qui prenne en compte la fragilité des supports numériques.

- Erich Spitz est ancien directeur général adjoint en charge notamment de la recherche et de la technologie du groupe Thomson (dont l’une des branches est devenue Thales), Président de l’Association européenne pour l’administration de la recherche industrielle (EIRMA) il a eu une position importante dans l’invention du disque optique. Erich Spitz est correspondant de l’Académie des sciences, membre de l’Académie des technologies.

- Franck Laloë est directeur de recherche au CNRS au laboratoire Kastler Brossel. Il a été directeur de ce laboratoire au département de physique de l’Ecole normale supérieure.

En savoir plus :

- Erich Spitz, correspondant de l'Académie des sciences, membre de l'Académie des technologies
- Franck Laloë, chercheur au CNRS

Jean-Charles Hourcade, Erich Spitz, Franck Laloë, Longévité de l'information numérique : Les données que nous voulons garder vont-elles s'effacer ?, éditions EDP Sciences, 2010


BBC News

Should you store treasured data on disks?

Franck Laloe, French National Centre for Scientific Research
Mr Laloe said CDs meant to last a long time were only good for a few years

By David Reid

Reporter, BBC Click

Preserving precious data, such as pictures and home videos, on CDs and DVDs could do more damage than good in the end.

That's what the French National Centre for Scientific Research has found out after testing the longevity of the portable media.

"We were surprised to see that the lifetime of discs, some of which were designed to last for centuries, actually rarely lasted longer than five to 10 years," said physicist Franck Laloe.

"In the most severe cases, which were happily quite rare, the data on some discs lasted just one year," he said.

Unlike audio and video tapes that wear out with play, discs are read with a laser so there is no physical contact.

However, the surface which contains more than seven miles of data is deteriorating with age.

Varied quality

French scientists calculated the likely life-span of a disc by artificially aging it with heat, water vapour and light.

Aged CD
Scientists artificially aged CDs with heat, water vapour and light

They found CD quality varied even across the same brand so people willing to pay more for a known name won't necessarily get a better product.

"The brand alone doesn't tell you if you have something that is high or low quality," said Jean-Michel Lambert, from the French National Metrology Laboratory.

"Disc production varies. In the same brand we find discs produced by different manufacturers which means their quality and how long they last for is not necessarily the same," he added.

Also, manufacturers branding discs with their logos could be making the data on them more vulnerable to corruption.

No guarantees

Documentary-makers record about five hundred gigabytes of HD for a 52 minute documentary and need to have a way of storing footage.

Jerome Duc-Mauge, executive producer at Cocottes Minute, keeps rushes stored in a combination of hard drives and data cassettes.

Jerome Duc-Mauge
Jerome Duc-Mauge believe there are no guarantees on rushes storage

But he still cannot be certain these storage solutions are the best options.

"This is a big drama, this issue of how long these pictures will last. We don't know. The manufacturer says to us, "Yeah, five years, 10 years, 15 years," he said.

"But we will see in 15 years, we'll see in 20 years if it is still here, or if it has just become a pile of dust at the bottom of the cassette."

There are a few precautions people can take to avoid losing their data. Mr Laloe said these meant being "vigilant".

"Every two or three years, you have to copy your archive onto fresh discs. And after that, because these new discs will last a bit longer, you will have to re-copy them after five or six years," he said.

Mr Lambert recommended spreading digital data rather than keeping it all archived in one place.

"You must have your information in two places at least - on a hard-disc, for example, and on another hard-disc or on a recordable DVD or CD."

Do you have home pictures or videos stored in CDs and DVDs? Would you bother to transfer them to new disks every few years? Or do you already keep them in a variety of places?


 

Présentation de l'éditeur


Pourquoi s'intéresser à la préservation à long terme de l'information numérique, alors que les capacités de stockage n'ont jamais été aussi vastes et bon marché ? Cette question soulève un problème de plus en plus important : nos sociétés produisent des masses croissantes d'information, alors même que la durée de vie des supports numériques disponibles pour la conserver n'a jamais été aussi courte.

Le stockage ou la sauvegarde à court terme ne soulèvent pas de question particulière, mais archiver de cette façon sur des décennies ou un siècle pose un tout autre problème, dans la mesure où les supports numériques n'ont qu'une durée de vie de 5 ou 10 ans environ. L'évolution de ces supports étant difficile à prévoir, seul un suivi constant des données et leur migration perpétuelle permettront d'en assurer l'archivage, avec un coût d'organisation important.

Si ce problème est correctement abordé clans quelques organismes publics spécialisés, il est très largement ignoré du grand public ainsi que de la majorité des institutions ou entreprises. Une importante quantité d'informations personnelles, médicales, scientifiques, techniques, administratives, etc., est ainsi en réel danger de disparition.

Devant ce constat, l'Académie des sciences et l'Académie des technologies ont créé un groupe de travail commun, avec l'ambition de faire le point sur le sujet. Le présent rapport se donne un périmètre précis en se concentrant sur la fraction de l'information qui garde sa valeur à long terme : documents soit personnels (souvenirs familiaux, données médicales, ...), soit publics (données scientifiques acquises lors d'expériences uniques, ...).

Les stratégies possibles sont discutées et les différents supports de stockage utilisables sont passés en revue, avec une brève discussion de leurs qualités et limitations respectives. Le rapport évalue également la possible généralisation de la stratégie active à l'ensemble des besoins de la société. Enfin sont étudiés les disques optiques numériques enregistrables, pour lesquels une série de mesures alarmantes a été effectuée récemment. Les auteurs proposent quelques pistes qui pourraient conduire à des disques enregistrables de bien meilleure longévité et émettent quatre recommandations de nature à faire prendre conscience de ce problème général et des voies possibles pour le résoudre.